Depuis quelques mois, des voix se font entendre pour dénoncer les abattages exécutés dans la Forêt Domaniale de la Malmaison, bois de St Cucufa par l’ONF.
Deux conceptions et deux approches différentes de la gestion des espaces boisés :
- D’un côté des riverains, surpris, inquiets et consternés, qui voient se modifier un lieu familier dans lequel ils viennent se ressourcer. Ils dénoncent des coupes-rases qui s’étendent sur de grandes parcelles, et qui concernent non seulement les châtaigniers malades mais également d’autres essences comme des hêtres ou des chênes tout à fait sains.
Ces espaces sont laissés sans aucune protection contre le soleil et les intempéries et il en résulte l’infertilité, la dégradation des sols et une atteinte à la biodiversité.
Il est également dénoncé l’utilisation d’énormes machines de bûcheronnage qui écrasent le sol et les racines et laissent des traces profondes dans la forêt. Certains détracteurs avancent que ces abattages répondent à un objectif financier pour renflouer les caisses de l’ONF, les coupes-rases demandant moins de temps que de pratiquer une sélection des arbres malades.
- De l’autre, l’ONF, qui gère cette forêt et qui, face à ces critiques et aux différentes actions menées par des associations et notamment l’Aseve, sort de son mutisme et relance une campagne de communication pour expliquer la nécessité d’abattre des châtaigniers qui sont atteints de « la maladie de l’encre ».
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Tout en conservant son esprit critique et en tenant compte des avis des deux parties, L’ASEVE, engagée dans la défense de l’environnement des espaces forestiers, a souhaité étudier ce dossier et écouter les différents intervenants pour démêler l’écheveau complexe de l’entretien des forêts françaises.
L’ASEVE est intervenue auprès de l’ONF pour obtenir un rendez-vous et auprès des différentes autorités publiques en adressant un courrier aux élus(e) afin de les sensibiliser et obtenir leur soutien : les Maires de Garches, Vaucresson, la Celle St Cloud, Rueil Malmaison, les députés de la 7ème et 8ème circonscription, les élus du Conseil Régional et du Département et de la Métropole du Grand Paris.
L’ASEVE a obtenu très rapidement un entretien avec Monsieur Beal, Directeur de l’ONF de la région ouest qui a évoqué les principes suivants
La nouvelle orientation de gestion des forêts a été mise au point en 2017 après une réflexion de 4 ans avec tous les partenaires concernés. Les forêts péri-urbaines ont un statut particulier compte tenu de leur proximité des grandes agglomérations et de leur fréquentation par un large public.
La nouvelle stratégie se décline en 3 axes :
- La mise place d’une sylviculture en « futaie irrégulière » et l’abandon des coupes rases.
- La commercialisation sous forme de » bois façonnés »
- Une nouvelle gouvernance.
En France, la gestion des forêts domaniales (environ 42 000 hectares) est assurée exclusivement par l’ONF, sur le principe de la futaie régulière à l’échelle de la parcelle.
Au contraire, la gestion des forêts péri-urbaines, basée sur le principe de la futaie irrégulière se fait arbre par arbre au sein de la parcelle et prend en compte l’aspect global de la forêt.
La nouvelle commercialisation « bois façonné » permet à l’ONF de mieux contrôler les chantiers de coupes tant sur le plan de la maitrise du calendrier, que sur la remise en état des lieux et l’évacuation du bois.
La nouvelle gouvernance consiste essentiellement à mettre en place des « comités de forêt ». Ceux-ci sont ouverts aux représentants de l’ONF mais aussi aux Politiques régionaux et aux associations, pour des échanges d’informations et la fixation d’objectifs.
La forêt de la Malmaison relève donc de cette politique générale de gestion des forêts périurbaines. Cependant celle-ci a dû être modifiée en raison de son état sanitaire. Cette forêt ainsi que plusieurs autres en Ile-de-France est plantée majoritairement de châtaigniers (60% environ), ainsi que de chênes, charmes, etc. Les châtaigniers sont atteints par la « maladie de l’encre ». Cet agent pathogène activé par les changements climatiques récents, vit dans le sol et attaque le système racinaire des arbres, entraînant un dépérissement rapide de ceux-ci.
Deux types de coupes sont programmées en lien avec cette maladie : des coupes sanitaires sur les parcelles les plus impactées pouvant conduire à des coupes rases, des coupes de sécurité aux abords des chemins et des routes.
- Beal signale que l’équilibre financier nécessaire à une bonne gestion de l’ONF est recherché essentiellement par des actions ciblées sur les coûts de structure et de personnel et non par une intensification des coupes d’arbres.
Il précise que la décision d’abattre un arbre est basé sur 3 critères : la sécurité, le sanitaire, la sylviculture. Il indique qu’il est impossible comme le font certains « experts » de juger de l’état d’un arbre ou d’une forêt en regardant uniquement le tronc lorsqu’il est coupé.
Il rappelle que la conception du temps n’est pas la même pour le forestier qui pense à 30 ans et l’usager qui recherche une jouissance immédiate du domaine.
Enfin il souligne que le changement climatique a une influence importante sur la vie de nos forêts. Il faut s’attendre pour les prochaines années à des changement importants dans la variété des essences qui seront plantées et en conséquence sur l’aspect général de nos forêts.
Notre conclusion :
L’ASEVE interpelle l’ONF
- Pour le respect du partenariat signé en 2019 entre L’État, la Métropole du Grand Paris et l’Office national des forêts sur la gestion des forêts péri-urbaines. Cette convention stipule que les actions menées par l’ONF (soutenues par des contributions financières) contribueront à la préservation, et à la valorisation de ces forêts.
- Pour la constitution d’un collectif de citoyens dont des représentants de notre association pour participer à la gestion et à la reconstruction de la Forêt
- Pour organiser, dès qu’il sera possible, une réunion publique avec les habitants des villes avoisinantes.
- Pour la suppression des coupes « rases »
- Pour une réflexion commune sur l’avenir des forêts en tenant compte de l’évolution climatique.
L’ASEVE demande aux personnalités politiques municipales, départementales, régionales, Grand Paris et aux députés des deux circonscriptions de la soutenir dans son engagement pour une gestion saine, réfléchie et concertée des forêts de notre région.